mercredi 6 juin 2018

Avenir de La Presse
L'État québécois doit abroger la loi de 1967. Point final.

Comme plusieurs, je m'inquiète de l'avenir des médias au Québec, plus particulièrement celui de ces médias qu'on qualifiait de "presse écrite" dans le passé. On l'a vu, dans l'étude du Forum des politiques publiques publiée l'année dernière, la presse écrite est vouée à une lente agonie si rien n'est fait pour lui venir en aide. En janvier 2017, l'étude "Le miroir éclaté" précisait en effet que 70% des revenus publicitaires sur internet étaient accaparés à eux seuls par Google et Facebook. Une année plus tard, on parle plutôt de 80%. Il ne reste que des miettes pour les médias. Il y a bel et bien péril en la demeure.
La Presse propose la création d'une OBNL. Il reste beaucoup d'éclaircissements à apporter sur cette nouvelle structure d'entreprise, j'en conviens. Pour ma part, je partage avec d'autres certaines préoccupations.
Toutefois, ce débat n'a pas sa place à l'Assemblée Nationale. Depuis qu'une loi privée a été adoptée en 1967, l'État Québécois a un droit de regard sur l'avenir et la trajectoire de La Presse. C'est aberrant qu'en 2018, 50 ans plus tard, un média doive se soumettre à la bonne et unanime volonté de tous les députés et partis politiques à Québec pour décider de son avenir. À l'occasion de cette commission parlementaire, je joins ma voix à d'autres organisations syndicales et professionnelles de journalistes pour souligner que l'État n'a pas à s'ingérer dans la gestion des médias ni dans sa ligne éditoriale. Cette loi désuète constitue une incongruité dont il faut se débarrasser. Elle doit être abrogée.
Les partis politiques québécois n'ont pas à profiter de cet anachronisme pour faire le procès de quel que journal que ce soit, La Presse y compris. Or, l'occasion est trop belle pour certains de régler des comptes avec La Presse et ses journalistes.
Mais encore une fois, ce n'est pas le forum pour tenir ce débat. Ce n'est pas à l'État québécois et aux partis politiques de faire comparaître un média pour le juger.
Il faut donc que les deux enjeux soient dissociés. Mettre un point final à cette loi totalement anachronique, est le seul débat pour lequel les hommes et femmes politiques de tous les partis politiques à Québec devraient être appelés à se prononcer.
L'autre débat, la structure organisationnelle et éditoriale de la nouvelle Presse+, appartient d'abord et avant tout au média concerné et à ses journalistes, à l'opinion publique, aux organisations professionnelles et syndicales de journalistes. Comme d'autres, j'ai certainement des inquiétudes et des préoccupations à cet égard. Je me sens habilité pour le faire, ce qui n'est pas le cas de l'Assemblée Nationale qui n'a rien à faire dans la chambre à coucher des médias.

Alain Saulnier
Note de l'auteur
En toute transparence, je dois préciser que je ne parle qu'en mon nom personnel et que je siège au conseil d'administration du Devoir depuis deux ans.
Je reste un observateur attentif et inquiet de l'avenir des médias québécois.

2 commentaires:

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